Des héros? Ils sont bien pires. Ce sont de jeunes salauds.
Le gars, on ne peut jamais vraiment le regarder dans les yeux. Sa frange noire cache tout, ou bien ce sont ses lunettes fumées. Elles sont en plastique, attachées à une chaîne de métal qu’il porte autour du cou comme un collier avec un médaillon en cœur. Ce qu’il dit tout bas, près du cendrier, ce sont des explications. Il semble surpris de lui, étonné de ne plus être obligé de porter ses lunettes fumées dans les endroits publics et devant tant de gens. Un jour, il raconte qu’il s’est levé et comme ça, il n’a pas mis ses lunettes. Ça n’a rien fait. Maintenant c’est le jour partout, il porte ses lunettes en collier, juste au cas où elles deviendraient indispensables, dans un couloir, devant une fille, devant une foule. Maintenant il a le cœur brisé. Il exige une maîtresse chaque soir. De la drogue tous les jours. C’est comme ça depuis qu’elle est partie qu’il nous raconte. Je ne vais quand même pas le serrer dans mes bras. C’est le genre de gars avec une ceinture en balles de fusil. Je regarde sa frange noire et je lui dis que le temps arrange tout. La fille à côté, en robe rayée, elle me regarde avec une clope dans sa bouche de couleuvre. Elle grimace : « Oui mais il n’y a pas de temps. Avec lui ça n’existe pas. T’as vu? Il n’a pas de montre. »
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